La rupture de la relation commerciale peut être justifiée par la crise
La rupture brutale d’une relation commerciale peut en ces termes ouvrir droit à indemnisation :
« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (…) de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels » (article 442-6 § I du Code de commerce).
L’entreprise victime de la rupture brutale d’une relation commerciale établie (à savoir une relation commerciale stable, significative et durable) peut ainsi solliciter des dommages et intérets si son partenaire a rompu brutalement cette relation.
Toutefois, le caractère brutale de cette rupture peut être légimité lorsqu’elle est justifiée par des circonstances économiques.
C’est en ce sens que s’est prononcée la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 8 novembre 2017 (R.G. n° 16-15.285).
Sur les faits soumis à la Cour de cassation
Une société spécialisée dans le commerce des chemises, avait confié à compter de l’année 2000 à une autre société, la maîtrise d’oeuvre de chemises fabriquées au Bangladesh, moyennant le règlement de commissions calculées en fonction du volume des commandes.
Reprochant à la première d’avoir diminué le volume de ses commandes à partir de l’année 2008, le maître d’oeuvre l’a assignée en paiement de dommages-intérêts notamment pour rupture brutale d’une relation commerciale établie.
En effet, conformément au texte précité, la rupture ouvrant droit à indemnisation peut n’avoir été que partielle, et peut n’avoir ainsi consisté qu’en une diminution de commandes.
Sur la solution donnée au litige
Le maître d’oeuvre, a néanmoins été débouté de sa demande par la Cour d’appel, de sorte qu’elle s’est ensuite pourvu en cassation.
La Cour de cassation a rejeté ce pourvoi en retenant que le partenaire commercial auteur de la rutpure « a souffert d’une baisse de chiffre d’affaires d’un peu plus de 15 % du fait de la situation conjoncturelle affectant le marché du textile, baisse qu’elle n’a pu que répercuter sur ses commandes dans la mesure où un donneur d’ordre ne peut être contraint de maintenir un niveau d’activité auprès de son sous-traitant lorsque le marché lui même diminue« .
Elle relève également que l’auteur de la rupture « a proposé une aide financière (au maître d’oeuvre) pour faire face à la baisse de ses commissions, démontrant sa volonté de poursuivre leur relation commerciale ».
La Cour de cassation relève enfin que le maître d’oeuvre « avait annoncé le 5 janvier 2010 qu'(il) augmentait le coût unitaire des chemises au motif que la baisse des commandes entraînait une augmentation de ses coûts de production« .
Elle Cour de cassation prend ainsi la peine de relever différentes circonstances (qui semblent attester de la bonne foi de l’auteur de la rupture) pour légitimer le rejet de la demande d’indemnisation.