Sur le rôle essentiel des simulations :
Afin de présenter le potentiel économique des biens immobiliers destinés à une opération de défiscalisation, les intermédiaires commerciaux en charge de la vente de ces biens auront bien souvent recours à des simulations.
Ces simulations présentent habituellement sous forme de projection les revenus et les charges que l’opération doit pouvoir générer, ainsi que le prix auquel il paraît prévisible de pouvoir revendre le bien à la sortie de l’opération.
Ces documents constituent souvent l’élément essentiel destiné à convaincre le prospect de conclure la vente.
Il arrive malheureusement que ces projections ne soient pas sincères, et qu’elles fassent état de résultats qui sont objectivement impossibles à atteindre.
Ces projections peuvent ainsi s’avérer trompeuses.
Sur la preuve du caractère trompeur de certaines simulations :
Dans quels cas ces simulations peuvent être constitutives d’un dol pouvant justifier la condamnation du promoteur et de ses intermédiaires commerciaux ?
En la matière, un arrêt de la Cour de cassation du 20 avril 2022 en fournit un exemple très intéressant.
Dans cette affaire, divers acquéreurs reprochaient à leur vendeur de leur avoir remis des simulations selon lesquelles les biens pourraient être revendus à un prix supérieur au prix d’achat.
Le prix de revente projeté était calculé sur la base d’une évolution annuelle à la hausse du prix d’achat pendant toute la durée de l’opération.
Or, le prix d’achat neuf d’un bien en état futur d’achèvement destiné à une opération de défiscalisation est nécessairement soumis à TVA, et son prix contient habituellement le coût de certaines prestations « packagées ».
Dès lors, la valeur intrinsèque du bien ne peut correspondre à son prix TTC et « packagé ».
En conséquence, le prix prévisible de revente du bien à l’issue du dispositif de défiscalisation ne peut objectivement pas être calculé sur la base d’une évolulation à la hausse du prix d’achat.
C’est pourquoi la Cour de cassation a approuvé en ces termes la condamnation en appel du mandataire commercial du promoteur au titre d’une tromperie :
« la cour d’appel, qui a retenu que le dol était démontré par un gain à neuf ans artificiellement augmenté environ du double en utilisant fallacieusement la valeur d’achat toutes taxes comprises (TTC) et non la valeur hors taxes du bien comme assiette de sa prise de valeur nette rapportée à la diminution du capital restant dû sur l’emprunt, et que la revalorisation du prix TTC était destinée à endormir la vigilance des cocontractants, a caractérisé l’intention dolosive du mandataire.«
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 20 avril 2022, 21-12.299 21-12.337
Cette décision est particulièrement remarquable puisque la Cour sanctionne ainsi une pratique très répandue parmi les réseaux de distribution de ces biens immobiliers.
Sur la sanction des simulations, quand bien même elles n’ont pas de caractère contractuel :
Implicitement, cette décision rappelle qu’une simulation engage la responsabilité de son auteur.
En effet, en cas litige, les mandataires commerciaux des promoteurs ont habituellement tendance à soutenir qu’une simulation n’est pas un document contractuel et qu’il n’implique aucune obligation de résultat.
D’ailleurs, les simulations contiennent fréquemment la mention « document non contractuel » apposée en caractères de petite taille, et les défiscalisateurs tentent habituellement de se prévaloir de cette mention en cas de litige.
Or, quand bien même ce document n’est pas contractuel, il n’en demeure pas moins un support essentiel d’informations destinées à convaincre l’acquéreur de s’engager.
Dès lors, le mandataire commercial ne peut impunément éditer et remettre des simulations trompeuses.